Oh. Mon. Dieu. Voici ma première chronique en tant qu'héritière officielle de la famille, et je ne sais pas par quoi commencer... Je voudrais quelque chose de solennel, de majestueux, qui ait la classe internationale, et tout ce à quoi je peux penser, c'est... LUI. L'Homme. Le Mâle.

Je l'ai rencontré au Magnolia Blossom Parc. Quand je l'ai vu, je l'ai trouvé tellement beau que j'en ai eu le vertige et que j'ai dû fermer les yeux ! Qu'il est beau mon latino ! Mon Don Diego de la Vega à moi !

Bon, Don Diego s'appelle en fait Sébastien. Et il n'est pas de la Vega mais Dupont. C'est moins la classe, mais tant pis, il est trop beau... Ni une ni deux, je suis passée à l'attaque... Je lui ai sorti quelques unes de mes blagues les plus désopilantes, et je crois que mon charme naturel a fait aussi son petit effet... Mais je n'ai pas osé aller plus loin, on venait quand même de se rencontrer... Depuis le mystérieux petit blondinet rencontré voilà des années dans ce même parc, je n'avais pas ressenti quelque chose d'aussi fort... ♥ ♥ ♥

Et en plus c'est un poète ! Je l'ai vu de mes yeux vu s'allonger par terre avec un enfant qui passait par là et commencer à discuter avec lui de la forme des nuages, du sens de la vie, de l'amour, d'où nous venons, d'où nous allons, de comment il allait conquérir mon coeur en m'enlevant sur son cheval noi... euh, non, pas la dernière... Beau gosse, poète, visiblement père idéal... Qui dit mieux ? "Mieux." "Ah vous, je vous ai pas sonné !"

Don Sebastian de la Vega, je t'aiiiime !

Bon, essayons de remettre les pieds sur terre... Une fois la décision de l'héritier prise, Hugo n'attendit pas longtemps avant de manifester son envie de prendre sa liberté.

J'ai donc serré mon jumeau-de-cheveux bien fort contre moi en lui souhaitant bonne chance...

Et je l'ai vu s'éloigner du manoir d'un pas alerte, prêt à embrasser avec joie la vie qui l'attendait au-dehors.

A part cela, je prends mes obligations d'héritière très au sérieux. Je me suis mise sérieusement au bricolage, et je vais en avoir besoin ! Les fantômes de la maison font régulièrement sauter la plomberie !

Beurk, et dire qu'il a vraiment fallu que je plonge mes mains dans ce tas d'ordure pour trouver des pièces à récupérer... Heureusement que c'était pas à Javel-John de s'en charger, il aurait fait un malaise...

Il s'est d'ailleurs chargé de la partie "nettoyage"... Sans rire (et c'est pas mon genre), il passe moitié de son temps à la maison à récurer, astiquer, balayer... On le voit sans cesse une éponge à la main...

Puisqu'il travaille désormais dans un restaurant, il a également été nommé Préposé à la Chose culinaire. Et l'ordinaire des repas du manoir a tendance à s'améliorer, ces temps-ci...

Il faut dire qu'en jeunes motivés et plein d'énergie que nous sommes, nous mettons beaucoup d'ardeur à monter les échelons de nos carrières respectives. J'ai passé de longues heures à répéter face à mon public en délire...

... ou pas.

Wi-wi lui aussi travaille dur. Il faut dire qu'avec son ambition de conquérir le monde, mieux vaut ne pas être à la ramasse... On le voit chaque soir faire son travail scolaire avec une application qui force l'admiration.

Et on le voit se lever aux aurores pour aller occuper son poste de barista. A l'instar d'un certain canard milliardaire, il a gagné précieusement le premier sou qu'il a gagné en pensant que ça lui porterait bonheur.

Ces derniers temps, Wi-wi et Gabriel se sont beaucoup rapprochés. J'imagine que c'est dû au fait qu'ils sont désormais les deux seuls adolescents de la couvée. Ils ont même fait le serment d'être pour toujours frères et amis. Et avec l'ego de Wi-wi, il fallait bien un petit selfie pour immortaliser ça !

Amandine, quant à elle, a du mal à progresser. D'après ce qu'elle m'a raconté, un de ses collègues aurait aidé à la guérison du chat du patron, et a raflé du même coup la promotion qu'elle attendait... "On est dans la mafia, ok, mais y a quand même un minimum d'honneur à avoir ! Je vais lui péter les genoux avec une batte de baseball !" Depuis, Père a caché toutes les battes de baseball du manoir...

Depuis que Hugo est parti, j'ai l'impression que Père a pris un coup de vieux... Et je ne parle pas de la moustache qu'il a décidé de se laisser pousser, mais il a moins d'entrain, et je l'ai même vu en train de relire les livres que nous lisions enfant...

Pour lui permettre de garder la forme et le moral, nous lui avons suggérer de reprendre le jogging. Étonnamment, nous n'avons pas eu besoin de trop insister, et désormais on le voit régulièrement au petit matin faire le tour du pâté de maisons.

Un soir, j'ai décidé de tenter ma chance d'humoriste en allant au Velours bleu. Enflammée et passionnée, j'ai enchaîné les vannes, les sketchs, les blagues devant le public...

toujours autant en délire... Pff, ils étaient tous au bar en train de se jeter un godet...

D'ailleurs, j'ai eu la surprise de voir que derrière le bar se tenait Arthur Owlblood, le cousin de Père et fils de grande-tante Sonia ! J'étais un peu honteuse, depuis la disparition de GGGMS, on a un peu coupé les liens avec eux...

Comme à leur habitude, les ancêtres viennent nous faire des coucous de temps en temps, et conseiller chacun en fonction de ses aspirations.

Heureusement que mes aînés, morts comme vivants, sont là, car il m'arrive d'avoir des petits moments de doute... Ma robe rouge se met alors à me serrer soudainement, comme si en m'étouffant elle voulait me faire comprendre que je ne suis pas digne de la porter... Mais un membre de la famille est toujours là pour me rassurer.

Ce qui m'a rudement fait plaisir aussi, c'est de voir que Don Diego est passé me voir ! Il a accepté qu'on prenne une photo ensemble, c'est un signe, non ? Il m'a même dit : "Tu sais Sara, t'es vraiment une super amie !" C'est pas super ça ? Mais... du coup ça veut dire qu'il ne me considère QUE comme une amie ? Mais c'est une catastrophe !

Du coup, dès le soir même, j'ai discuté avec lui sur Simbook, et j'ai glissé quelques sous-entendus par-ci par-là... Sans réaction. Ah, les hommes je vous jure... J'ai pris mon courage à deux mains, et je l'ai invité au manoir le lendemain... pour lui faire ma déclaration...

Ce coup-ci, j'ai de bons espoirs. Il rit bien à mes blagues, on est encore plus complices suite à notre discussion d'hier soir... Bon, faut juste que je me débarrasser de Javel-John, et je me lance... Allez ma grande,

3, 2, 1...

WHAT ?????!!!!!!

Non mais dites-moi que c'est un cauchemar ? Don Diego de la Vega dans les bras de John ? MON Don Diego en train de se faire bécoter par MON frangin ? Y a erreur là !!

"John ! Ôte tes sales pattes bien propres car javélisées de Don Diego ! Un Don Diego c'est personnel, interdiction d'y toucher !" Le temps que je me retourne, l'autre s'était éclipsé...

"Mais Sara ?? Qu'est-ce qu'il t'arrive ?" "Il m'arrive que même s'il ne le sait pas encore, Don Diego est l'amour de ma vie, et que je t'interdis de l'embrasser, de le bécoter ou je ne sais quoi d'autre ! Et d'ailleurs, c'est nouveau cette idée d'embrasser les garçons ?"

"Bon Sara, c'est fini maintenant les bêtises ? Tout d'abord il ne s'appelle pas Don Diego mais Sébastien, alors s'il te plaît ! Et... oui, il se trouve que j'aime les hommes. J'hésitais à en parler parce que je ne savais pas comment vous alliez le prendre..."

"A vrai dire, Sébastien et moi nous sommes rencontrés il y a quelques temps. On a tout de suite beaucoup accroché. Si quelque chose se rapproche du coup de foudre, c'est sans doute ce qui nous est arrivé. Et on s'aime. Alors ça serait plutôt à moi de te demander de ne pas l'approcher !" John sortit de ma chambre, mais je le rattrapais rapidement.

"Mais... mais... moi aussi je l'aime.....                     Et puis, tu m'as vu m'intéresser à lui ! Tu aurais pu me dire qu'il était pas du même bord, plutôt que de me laisser nourrir de faux espoirs !" "Sur ce point tu m'en vois désolé... On en parlait justement avant que tu ne rentres... J'aurais voulu que tu apprennes ça autrement, je le reconnais..." De rage, je quittais descendit les escaliers quatre à quatre et croisais Père qui montait."

"Eh bien vous deux ? C'est quoi cette dispute ? On vous entend jusque dans le jardin ?

- Oh, c'est rien, Père...

- Allons, c'est pas souvent qu'il y a des éclairs entre vous ! Dis-moi tout !

- Bon... Père, il faut que j'avoue un truc... Je suis amoureux de Sébastien. Et je sais que lui aussi est amoureux de moi...

- ...........

- Père ? Est-ce que ça va ?

- Dans mes bras mon fils à moi ! La nouvelle est surprenante, mais si c'est la voie que tu as choisi, je suis heureux que tu aies pu t'affirmer et je te souhaite tout le bonheur qu'un père peut souhaiter à son fils !

- Merci, Père...

-Euh... ça va fiston, ça va. Inutile de pleurer, tu sais..."

La nouvelle était dure à encaisser ! Au même moment j'apprenais que mon frère et l'homme que j'aimais étaient gays, et qu'il fallait donc que je fasse une croix sur mon beau Latino ! J'hésitais entre éclater de colère et pleurer sur mon coeur brisé à jamais...

Pour me passer les nerfs, je pris ma clé à molette préférée et me mis à réparer la baignoire du rez-de-chaussée dont les tuyaux avaient encore lâché.

A qui la faute ? Je vous le donne en mille : mon arrière-grand-mère Cassandra ! Enfin, cette rencontre me permit également de me confier à elle, et de profiter de sa sagesse d'ectoplasme. "Tu te rends compte, Mémé ? Mon premier et unique amour, il a fallu que je tombe sur un homo ! Je crois que je ne pourrais jamais aimer quelqu'un autant..." "Allons, allons, ma petite puce ! Ne dis pas de bêtises ! Ce n'était pas le bon, voilà tout ! Tu es une jeune fille drôle, très intelligente, et aussi jolie comme un coeur ! Je suis sûre que les garçons vont tomber comme des mouches !" Elle sait toujours me réconforter, Mémé Cassandra...

Heureusement, le lendemain soir apporta de quoi me changer les idées. C'était l'anniversaire de Wi-wi, qui devenait un jeune adulte ! A la grande joie de Hugo et Gabriel...

Et voilà comment petit Wi-wi devint grand, entouré de toute sa fatrie ! A force de passer son temps dans les lives, monsieur était devenu rat de bibliothèque.

Pendant ce temps, à l'insu de tous, une autre partie se jouait pour John, qui avait invité Don Die... Sébastien.

"Mon Séb, ça fait maintenant quelques temps que nous sommes ensemble, et avec toi je vis le rêve... Alors je te le demande à genoux : veux-tu devenir mon homme ?"

Et c'est ce soir-là que Javel-John unit son destin à celui de Don Diego de la Vega...

Et ils redescendirent immédiatement pour annoncer la nouvelle à Amandine... "Mère, je pense que Père t'a dit au sujet de..." "Au sujet que tu es momo ? Et le p'tit Séb aussi ? Oui ! Tant mieux, la lessive Momo lave plus blanc que blanc !" "Euh... Si tu veux, Mère..."

Deux coups durs à deux jours de suite, je n'en pouvais plus... Mon Don Diego, bientôt marié à mon frère ? Et moi dans tout ça ? J'allais certainement finir vieille fille, le Legacy allait s'arrêter avec moi...

"Ben alors, ma Sara ? Qu'est-ce que tu fais ici toute seule ?" "Oh... C'est rien Wi-wi... J'avais besoin d'être un peu seule..." "C'est John et Seb, c'est ça ?" "Oui... Je pensais tellement que c'était l'homme de ma vie, et voilà que tout s'écroule pour moi... C'est un peu dur..."

"Allons, allons... Viens-là toi. ça ne fait pas longtemps que tu es passée à l'âge adulte, tu as encore du temps devant toi ! Nul doute que tu trouveras un jour celui que tu cherches, et il sera encore mieux que Seb, j'en suis sûr !" "Merci... Je t'aime frérot..." "Moi aussi je t'aime soeurette."

Finalement, je me suis retrouvée à manger ma part de gâteau toute seule, tout le monde était déjà couché... Mais au moins j'ai eu du temps pour réfléchir, et réfléchir seule...

Le lendemain, face aux nouvelles des fiançailles de John, une question traversa la tête de William. "Mais... Si tu es gay, pourquoi tu as dragué Alexandra ?" "Quoi ? Mais je ne l'ai jamais dragué ! On a juste parlé un peu et plaisanté, mais je ne l'ai en aucun cas draguer ! T'es fou !" "C'est vrai ? Mais alors il faut absolument que je la rappelle pour m'excuser et la reconquérir !"

Et William décrocha aussitôt son téléphone pour inviter son premier amour... "Allô ? Alexandra ? Oui c'est William ! Quoi ? Pas maintenant ? Ok je rappelle plus tard !"

Pendant ce temps, au salon, une autre discussion avait lieu. "Père, Sara, voilà, j'ai bien réfléchi. Je suis encore ado, mais j'ai envie de prendre mon indépendance vis-à-vis du manoir. Surtout que ça n'est pas moi l'héritier. J'ai besoin de prendre de la distance, l'environnement ici est vite pesant... J'aimerais aller habiter avec William lorsqu'il partira, si vous êtes d'accord." "Euh.. Eh bien après tout, pourquoi pas, oui... Cela serait une bonne expérience pour tous les deux, et si tu as besoin, tu peux toujours revenir ici."

En fin de journée, William avait réussi à joindre son Alexandra et à la faire venir. Il enchaîna plates excuses sur plates excuses pour reconquérir le coeur de sa belle... Mais un obstacle se dressait entre eux : la demoiselle était toujours une adolescente !

Ni une ni deux, William fila en cuisine préparer un anniversaire surprise pour sa belle ! Car oui, c'était l'anniversaire d'Alexandra !

Et à peine eut-elle soufflée ses bougies que Roméo-William passa à l'action ! Et que je te complimente, et que je t'envoie des baisers...

Jusqu'à arriver à son premier vrai baiser !

Le lendemain matin, au petit-déjeuner, j'eus la surprise de découvrir qu'Alexandra avait emménagé au manoir dans la nuit. Cela me permit de faire plus ample connaissance avec ma future (?) belle-sœur.

Dans l'après-midi, je fis une escapade au Magnolia Blossom Parc pour me changer les idées. Malheureusement, malgré tous mes efforts, mon style musical faisait toujours aussi peu d'adeptes... Nous vivons vraiment dans un monde de barbares ! Il manquerait plus que je finisse bâillonnée et attachée à un arbre !

Mais dès le lendemain, j'eus la surprise d'apprendre que William, se sentant appelé par son destin de maître du monde, envisageait déjà de déménager. Bien sûr, Alexandra l'accompagnait. Ce qui me surprit le plus fut la décision de Gabriel de partir avec eux. Lui et William étaient devenus inséparables, et il avait lui aussi très envie de s'éloigner du manoir familial.

En grande sœur modèle (et désormais chef de famille), je les serrais bien fort dans mes bras en leur demandant de prendre soin d'eux... Mes deux petits frères allaient me manquer, c'est sûr...

Enfin à peine la place libérée que Don Die... Sébastien vint s'installer au manoir. John et lui voulaient se marier sur le domaine familial avant de partir vivre eux aussi leur vie de leur côté.

Quoiqu'il en soit, tout se déroula rapidement. Le jour suivant de l'emménagement de Sébastien était le jour du mariage. Père, le premier prêt, rêva un long moment devant l'arche de mariage. Lui et Amandine ne s'étaient jamais mariés, et peut-être le regrettait-il aujourd'hui...

Les futurs mariés étaient au comble de la joie. Bon, John avait failli faire 36 crises cardiaques parce que les fleurs seraient plus rose saumon pâle que rose saumon foncé, et que le gâteau serait plus nougatine/petits choux que petits choux/nougatine, mais dans l'ensemble Sébastien avait réussi à calmer et rassurer sa moitié. (ou son moitié ?)

Le mariage a bien failli débuter par un drame... William, trop gourmand, a voulu goûter au gâteau de ma plante-vache, résultat Marguerite (c'est son nom) a avalé tout cru le futur maître du monde. Heureusement, Wi-wi ne semblait pas à son goût, et elle l'a recraché !

Puis vint la cérémonie proprement dite, sous les yeux de toute la famille. Je dois reconnaître que j'étais partagée entre la joie de voir mon frère épouser l'homme de sa vie, et l'amertume de voir mort et enterré tout avenir avec Sébastien. Mais emportée par la joie des autres membres de la famille, je réussis à laisser de côté mon amertume pour le reste de la journée.

Père et Amandine offrirent aux jeunes mariés un voyage en fusée assez... particulier. Si je me marie un jour, j'espère ne pas avoir droit au même, l'espace me fait bien trop peur !

Au moment du gâteau, Père et Amandine passèrent un long moment, les yeux dans les yeux, à se rappeler leurs jeunes années. Si enfant j'aurais aimé que Père et Mère se remettent ensemble, aujourd'hui cela n'avait plus d'importance depuis longtemps. Nous formions tous une vraie famille unie, et c'était tout ce qui m'importait.

La fête fut fort réussie. A peu près tout le monde dansa jusque tard, sauf Gabriel qui pensait à sa prochaine partie de pêche, et Amandine qui nous a pourtant assuré que "Si si, l'hémisphère droit de mon cerveau danse, c'est le gauche qui veut pas !"

Plus tard dans la soirée, nous la retrouvâmes dans le salon, en train de raconter des histoires d'aventuriers et d'arche perdue à ses petits-enfants (imaginaires).

Dès le lendemain matin, les tourtereaux organisèrent leur départ en voyage de noces et leur départ du manoir. "Wah, le village Takemizu, vous en avez de la chance ! J'espère qu'un jour je pourrais y aller aussi !" dis-je en serrant John dans mes bras. "Et surtout n'oublie pas, la réserve de javel est dans le placard du bas, le 3e en partant de la droite dans la cuisine !" Me dit-il avant de monter dans la navette qui devait les emmener.

Deux jours après le mariage, alors que je rentrais du travail, Père m'appela au salon. "Bon, Sara, les derniers jours ont été... éprouvants pour toi. ça n'est pas du tout une critique, au contraire tu t'en sors très bien et je suis fier que tu sois mon héritière. Mais Amandine et moi pensons que tu as besoin de te changer les idées, de prendre un peu l'air. Alors voilà, nous avons décidé de t'offrir un séjour à Granite Falls ! Toi toute seule et la nature ! C'est pas génial ça ?"

Aussitôt dit, aussitôt fait. Dès le lendemain matin je profitais des grands espaces, du calme et de l'air pur de Granite Falls. Père avait raison, après tous les évènements qui s'étaient produits depuis ma nomination comme héritière, j'avais bien besoin de souffler un coup.

Au cours de cette première journée, je renouais avec les petits plaisirs de Granite Falls : partir à la découverte de sa faune et de sa flore, apprécier ses paysages et le bruit apaisant de ses chutes d'eau... Je me décidais même à pousser la chansonnette, pour me découvrir un public de campeurs !

A la nuit tombée, à force d'exploration, je découvris un étrange passage caché par un buisson de ronces. N'écoutant que mon courage, je tentais de m'y frayer un passage en ignorant les griffures des épines...

Pour déboucher sur une clairière au cœur de la montagne. En m'avançant, je découvris une petite maison baignée par la lumière de la pleine lune.  Quelqu'un habiterait donc ici ? Cependant, je ne vis personne aux alentours. Affamée, je me fis griller quelques marshmallows avant de rentrer à mon campement, mais j'étais bien décidée à revenir le lendemain éclaircir ce mystère...

C'est ainsi que le lendemain, en début d'après-midi, j'étais de nouveau dans la clairière. Je m'approchais de la maison, mais toujours personne aux alentours, jusqu'à ce que j'entende une voix m'interpeller.

"Hey, vous, là ! Qu'est-ce que vous faites ici ?" "Euuuh... Je... j'ai trouvé le chemin au travers les ronces par hasard, et poussée par ma curiosité, je suis arrivée jusqu'ici..." "C'est vrai ? ça alors, vous êtes la première depuis des années à parvenir jusqu'ici !"

"Hein ? Quoi ?! Vous voulez dire que vous vivez tout seul ici ?" "Oui, je suis le Garde-Champêtre. Depuis des générations, l'aîné, fille ou garçon, vient vivre ici pour veiller sur la forêt et son écosystème. Dans mes veines coule le sang d'anciens chamans indigènes qui communiquaient avec les esprits de la forêt il y a déjà 300 ans !" "Eh ben, ça fait un paquet d'années !"

"Au fait, moi c'est Lucas. Lucas Chevalier. Et toi ?" "Euuh.. Sara... Sara Owlblood !" "Enchanté ! Laisse-moi te faire un câlin en signe d'amitié !" "Euh... Ok..." Un peu hippie sur les bords, l'indigène...

Finalement, Lucas était vraiment un compagnon charmant. Nous passâmes la soirée au coin du feu, à parler de tout et de rien. Il me proposa même de rester quelques jours, histoire de me faire découvrir les joies de la vie isolée. Curieuse de voir à quoi une vie d'ermite pouvait ressembler, je m'empressais d'accepter son invitation.

Le lendemain matin, après une bonne nuit de sommeil, j'eus même droit au petit-déjeuner dès la sortie du lit... C'est peut-être pas un hôtel 5 étoiles, mais la qualité du service était vraiment irréprochable !

Les deux jours qui suivirent furent un vrai délice. Notre temps était divisé entre plusieurs activités. Nous passions des heures à deviser sur la forme des nuages.

Lucas m'initia également à la pêche à la truite de Schubert, qui ne se pratique que la nuit et à des endroits bien spécifiques.

Lucas passait également de longues heures dans son jardin d'herboriste, et m'enseignait comment reconnaître une bonne plante d'une mauvaise, ainsi que les vertus de chacune.

Le soir au coin du feu (dehors, cette fois), je poussais la chansonnette, histoire d'égayer nos soirées.

Et au soir du deuxième jour, alors que nous étions tranquillement en train de finir notre repas (j'avais essayé les insectes pour la première fois)...

Soudainement, sans comprendre comment, je me suis retrouvée dans ses bras, blottie contre lui... Et tout ce que je savais, c'est que je ne m'étais pas sentie aussi bien depuis une éternité, et que j'avais envie d'y rester pour le restant de mes jours...

Mais voilà que l'instant d'après, nous étions en train de nous embrasser avec passion. Je sentais son corps contre le mien, ses mains qui caressaient mon dos et le creux de mes reins tandis que les miennes enlaçaient ses épaules. Je sentis une douce chaleur monter en moi, et mon cœur se mit à battre plus vite, comme s'il voulait sortir de ma poitrine...

Et sans cesser de m'embrasser, avec douceur et tendresse, il inclina mon corps pour m'allonger à même le sol. Puis il s'allongea à côté de moi, et commença à retirer mes vêtements les uns après les autres tout en me couvrant de baisers. Et dans mes yeux se reflétaient les étoiles du ciel...

Le chant des oiseaux me réveilla. En me tournant dans le lit, je vis Lucas endormi à côté de moi. Et soudain, tout me revint. Le baiser près du feu, la nuit sous les étoiles... Cela me fit l'effet d'une douche froide. Qu'avais-je fait ?! Je m'étais offerte telle une Marie-couche-toi-là au premier venu, aussi beau soit-il avec sa crinière de feu et ses yeux bleus... La honte et la panique me submergèrent. Qu'avais-je fait ? Qu'allaient penser Père et Amandine ? Et si... et si... Je préférais ne pas envisager l'éventualité d'un "accident" de parcours.

Il fallait que je m'en aille. Que je parte avant qu'il ne se réveille... Il fallait oublier cette erreur, cette nuit magique d'égarement... Non mais ma pauvre fille, tu t'es vue ? Tu t'entiches d'un homo et tu vas te consoler avec le premier barbu qui te passe sous la main ! En silence, je me glissais hors du lit, je rassemblais mes affaires et je filais en douce...

Et bien sûr, de retour au Manoir, rien n'allait puisqu'en mon absence Père semblait avoir pris 30 kg, et tout dans le ventre.

"Le soir du mariage de John, j'ai aperçu une étrange lueur au-dehors... Je suis allé voir, et depuis, mon ventre me fait atrocement mal et n'a pas arrêté de grossir !" Pour avoir lu plusieurs articles sur le sujet, Père savait ce qui l'attendait...

Et effectivement, quelques heures plus tard je me retrouvais avec une petite demi-soeur verte du nom de Zira. Autant dire que vu l'âge de Père et d'Amandine, le futur de cette enfant était entre mes mains... Nous discutâmes longtemps de la marche à suivre, et finalement nous étions d'accord sur le fait qu'elle était elle aussi une Owlblood, et qu'elle avait donc sa place au manoir jusqu'à ce qu'elle souhaite s'en aller.

Bien que franchement surpris par cette naissance, Père s'attacha rapidement à ce nouvel enfant venu d'ailleurs, et lui donna autant de tendresse que lorsque j'étais à sa place.

Cherchant à oublier mon aventure à Granite Falls, je repris le travail d'arrache-pied en me produisant régulièrement au Velours Bleu.

Et à ma grande satisfaction, le public commençait timidement à me remarquer et à s'intéresser à moi. "Et là le perroquet lui répond : attends, je vais te voler dans les plumes !" Mouais, c'est pas ma meilleure, celle-là... Mais ? Mais ?!

"Dis donc toi, tu crois pas que je t'ai pas vu ? Avec tes cheveux bruns et ta robe rouge ! Oui, c'est à toi que je parle ! Y a une robe rouge en trop ici, ma cocotte, alors j'ai pas intérêt à te recroiser dans les environs avec ! Sinon je vais te montrer de quel bois se chauffe une Owlblood ! Et je te préviens, c'est du chêne !"

Le lendemain, Père et Amandine me convoquèrent dans le salon. "Sara, nous avons bien réfléchi, et Amandine et moi avons décidé de te laisser le manoir." "Hein ? Quoi ? Comment ça ?" "Tu es une grande fille et tu te dois de prendre en main l'avenir de la famille. Nous allons partir un bon moment en vacances, et pendant ce temps tu auras le manoir pour toi toute seule ! Et de toute façon nous ne sommes pas éternels, alors il faut que tu t'habitues à agir de façon responsable." "Mais j'agis toujours de façon respon........ Ok !"

"La navette arrive dans quelques heures, alors nous allons finir de nous préparer." "Déjà ? Ah ben alors bonnes vacances à vous deux !" "Merci ! Et prends bien soin de ta soeur, hein ! Ne fais pas trop chauffer le biberon ni l'eau du bain, n'oublie pas !" "Euh... oui oui !" Elle est fichue.

J'étais donc seule au manoir, avec une salade en guise de demi-soeur et une plomberie comme toujours défaillante. A ma manière, j'étais toute aussi débrouillarde que Lucas !

Heureusement, la petite salade devint vite une grande asperge, qui d'ailleurs me ressemblait plus que je ne l'aurais souhaité. Mini-moi version verte !

Pour le caractère, Zira semblait plus tenir de mon jumeau-Hugo et avoir comme lui le goût de la découverte et de l'aventure. Il n'y a qu'à voir avec quel entrain elle avait grimpé le bateau-pirate.

Père et Amandine n'étaient pas partis depuis trois jours, qu'à ma grande surprise je vis Lucas débarquer au manoir.

"Sara, je... Depuis cette nuit que nous avons passé ensemble, et depuis que tu es partie sans explication, je n'arrête pas de penser à toi... Je crois que je ne peux plus vivre sans toi. Je sais que tu as un rang et une place à tenir ici, dans ce manoir, alors j'ai décidé de quitter ma forêt pour savoir si tu voulais bien de moi dans ta vie." Eh ben, il n'y va pas avec le dos de la main morte ! Bon, c'est vrai que j'ai un peu pensé sans arrêt à lui depuis cette nuit-là, mais c'est pas une raison... Si ?

"Euh... écoute Lucas... Je suis très touchée par ce que tu me dis là, mais... Enfin euh... Toi, moi... Tu crois que c'est une bonne idée ? Et tu n'as pas une forêt à garder ?" "Ok, je vois..." "Non, enfin, je veux dire... Je tiens beaucoup à toi, mais euh... on a tous les deux des obligations bien distinctes, et... enfin je sais pas trop... Laisse-moi quelques jours pour réfléchir, d'accord ?" "D'accord..."

"Grande soeur, c'était qui le monsieur avec les cheveux rouges ?" Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à mettre les pieds dans le plat, aujourd'hui ? "Euh... personne ma puce... Un bon ami à moi..." "Il veut t'épouser et te faire plein de bébés, comme dans l'histoire que tu m'as lue hier soir ?" "Euuuuh..... C'est un peu ça oui." "Et toi tu veux pas ?" "Ben, euh... C'est plus compliqué que ça..."

"T'es pas amoureuse de lui ?" Je tiquais net. Certes ces derniers jours j'avais beaucoup pensé à Lucas, et le souvenir de la nuit que nous avions passé ensemble hantait chacun de mes pas, au point que j'avais parfois envie de tout laisser tomber juste pour aller revivre ces deux jours que nous avions passé ensemble, hors du monde... S'il y a une définition à l'amour, ça devait être celle-là, non ? Vouloir être sans arrêt avec cette personne et être prête à tout pour elle, non ? Un timide "Si" sortit de ma bouche, et Zira répondit aussitôt : "Ben alors ? Qu'est-ce que t'attends ?" A nouveau je pris quelques instants pour réfléchir posément. En partant du principe que j'étais amoureuse de lui, et que visiblement lui de moi, et qu'il était prêt à laisser sa forêt pour moi... Logiquement, Zira avait raison, rien ne m'empêchait de faire ma vie avec lui...

Le lendemain matin, je m'assurais que Zira jouait tranquillement avant d'appeler Lucas. Il fallait que je lui parle, et je voulais être sûre de ne pas être dérangée.

Celui-ci répondit bien sûr instantanément à mon appel, et arriva même une rose à la main. Il est trop chouchou, non ?

"Ecoute Lucas, j'ai bien réfléchi... Et c'est d'accord ! Je ne vois pas d'obstacle suffisant qui s'y opposerait. Vivons ensemble !" "Hein ? Vrai de vrai ?" "Oui mon beau Garde-Champêtre !"

Cette fois-ci, ce fut avec tendresse qu'il me serra contre lui. En mon for intérieur, je savais que je faisais le bon choix, et que c'était ce que je voulais depuis des jours. Enfin, je retrouvais ses bras dans lesquels je me sentais si bien...

Aussitôt dit, aussitôt fait. Au passage, j'informais Zira que Lucas vivrait désormais avec nous, et je la remerciais chaleureusement de m'avoir fait réfléchir sur ce que je voulais.

A peine avait-il installé ses quelques affaires que j'emmenais Lucas en ville pour un relooking complet. Je l'aime, mais je ne peux pas passer ma vie avec un druide des bois !

"Je me sens un peu serré quand même..." "Mais non mon chéri, tu es très bien ! Un vrai Owlblood !"

Voilà longtemps que je n'avais pas écrit, mais il faut dire que la vie au manoir s'écoule paisiblement ces derniers jours. Entre Lucas et moi c'est toujours l'amour avec un grand tas. Je pourrais passer ma vie au creux de ses bras.

Un matin dans la salle de bain, Monsieur décida de me surprendre. "Dis donc toi, tu sais que tu es sacrément sexy avec ton vieux pyjama ?" "Euuuh... vraiment mon chéri ?"

"Sara Owlblood, je veux passer le reste de ma vie à tes côtés. Veux-tu m'épouser ?" Je ne vous raconte pas mon émotion ! Bon d'abord le choc de la surprise, puis mon cœur s'est mis à faire n'importe quoi, j'avais l'impression d'avoir un orchestre philharmonique dans la poitrine !

Interlude

Bien sûr que j'ai accepté, vous auriez vu ce diamant ! Si Lucas était assez amoureux de moi pour me demander en mariage alors que je portais ce vieux T-shirt, j'étais moi assez amoureuse pour accepter !

A part me demander en mariage, Lucas passe ses journées à s'occuper du potager, et bientôt les premières récoltes rapporteront un peu d'argent. Je crois que sa forêt lui manque un peu, même s'il n'en montre rien.

Zira est toujours aussi casse-cou et aventureuse. Elle a déjà décrété que quand elle serait grande, elle serait la reine des pirates. Alors elle commence dès maintenant à s'entrainer à donner des ordres à ses amis imaginaires.

Elle s'entraîne aussi à franchir des ponts imaginaires surplombant des ravins et à échapper aux corsaires du roi. Sa présence pleine de vie apporte un nouveau souffle au manoir, et je dois dire que sans ma petite sœur, nos vies seraient bien mornes.

D'ailleurs, elle passe le plus clair de son temps dehors, et si nous n'étions pas attentifs les devoirs ne seraient pas fait souvent !

Père et Amandine sont revenus de leur voyage il y a quelques jours, ravis mais exténués.

"Alors les tropiques, c'était comment, Beau-Papa ?" "De une c'était splendide, de deux ne m'appelle plus jamais Beau-Papa sinon tu comprendras pourquoi il y a blood dans Owlblood !"

Malheureusement, à peine 24h après être rentrés, Amandine se sentit pris d'une soudaine faiblesse. Et ça n'était pas à cause de la nourriture étrangère...

Amandine s'effondra pour ne plus se relever. Nous vîmes la sinistre silhouette apparaître, et emporter avec la folle étincelle de vie qui animait celle qui fut une mère pour moi. Mais ce fut pour Père que le coup fut le plus dur. Il perdait l'amour de sa vie, sa raison d'être.

Il alla confier son désarroi à Matho, qui semblait bien mal à l'aise de voir son petit-fils ainsi endeuillé. Peut-être lui demandait-il aussi des informations sur la vie après la mort et ses chances de revoir sa bien-aimée.

Et le lendemain matin, à peine levée je vis qu'il était devant la tombe d'Amandine, sans dire un mot ni pleurer, mais le visage rongé par le chagrin.

Pour essayer de lui changer les idées, j'organisais une après-midi piscine. Et avec la chaleur de ces dernières semaines, tout le monde en avait besoin !

Je me suis même essayé à la préparation de boissons fraîches. Moi, un désastre ambulant ? Je ne vois pas de quoi vous parlez...

Malheureusement, il faut bien avouer que ce fut un coup d'épée dans l'eau et que tout cela fit peu d'éclaboussures sur l'humeur de Père, qui ne semblait pas près de se dérider. Bon, je n'attendais pas non plus un fou rire, mais j'espérais lui avoir un peu changé les idées.

Le jour suivant, face à cette situation, mon cher et tendre décida de prendre la situation en main. Il me chuchota quelques mots qui me firent frémir, puis lança à Père : "Beau-Peuuuh... Walter, allez mettre vos plus beaux habits et allez dans le jardin, une surprise vous attend !" Pendant ce temps-là, je me faufilais à l'étage...

Pour redescendre vêtue de ma robe de mariée achetée quelques jours plus tôt. Lucas avait décidé d'avancer la date de notre mariage, en espérant que cela apporterait un peu de joie à Père.

C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés devant l'arche de mariage, prêts à échanger nos vœux, et avec pour seuls spectateurs Zira et Père. J'aurais aimé faire un grand mariage réunissant toute la famille, mais mon Lucas était un solitaire, ce petit comité lui convenait bien mieux.

Enfin, le grand jour était venu pour moi. Je réalisais un rêve, j'accomplissais mon devoir d'héritière, et à cet instant mon avenir prenait la forme d'un beau rouquin aux yeux bleus fixés sur moi comme si j'étais un trésor.

Allez zou, viens là que je t'épouse ! Je suis à toi, tu es à moi, à la vie à la mort ! Emballé c'est pesé !

Une fois les vœux échangés, Père vint me serrer longuement dans ses bras. Je ressentis dans cette étreinte tout le chagrin qui l'habitait, et toute la solitude qu'il fuyait, et je me sentis bouleversée.

Un peu de douceur fut apportée par la pièce montée, que j'étais allée chercher en hâte chez un pâtissier le matin même. Bon, j'avais pris le premier gâteau un peu blanc qui passait, mais ça compte quand même hein ?

Mais malheureusement, malgré son faible sourire, la douleur du deuil était encore trop forte pour que Père se laisse aller totalement à sa joie... Mission à moitié accomplie...